
Le commissariat de police de l’avenue Franklin-Roosevelt est le lointain héritier d’une présence des forces de l’ordre qui fut vivement réclamée, il y a près de 150 ans. Morceau d’histoire.
Poursuivez l'Histoire : Retrouvez ici le texte complet de l'article "Histoire et Patrimoine" dont un extrait est présenté dans le magazine municipal B[r]ONjour n°45 de mars 2025.
Bron en avait les sangs tout retournés. Songez-donc, ce village d’agriculteurs, à peine peuplé par 2000 habitants, voyait d’un seul coup débarquer des centaines d’ouvriers ! Issus des quatre coins de France et sans doute aussi d’Italie, ils venaient construire le fort de Bron, les batteries de Lessivas et de Parilly, sans oublier le rempart ceinturant Lyon. Et allaient demeurer chez nous pendant de longues années. Alors ni une ni deux, en 1878 d’abord, puis à nouveau en 1885, le conseil municipal demanda que soit créé « un poste de gendarmerie ou de sergents de ville ». Sa mission ? Veiller au « maintien de l’ordre, au respect des propriétés et des récoltes », et prévenir les conflits qui pourraient survenir entre « cette multitude d’ouvriers » et la population. Comme il en allait « des intérêts du pays », satisfaction fut donnée aux élus. Mais sitôt les travaux terminés, les gendarmes plièrent bagage, et le maintien de la paix ne reposa plus que sur les gardes-champêtres municipaux.
… et des maisons closes
Sauf qu’avec le début du XXe siècle, Bron changea radicalement d’aspect et se mua en ville, dépassant les 13 000 habitants en 1936. Impossible, dès lors, de compter sur les seuls gardes-champêtres. D’autant plus que notre commune abritait 1106 militaires appartenant à la base aérienne, qui lui causaient bien des soucis : « notre administration a dû intervenir énergiquement à de nombreuses reprises pour faire cesser certains abus tels que destructions de récoltes, bris de lampes d’éclairage public, tapage nocturne ». Même les bonnes mœurs se trouvaient affectées par ces soldats, à cause « de certains tripots clandestins, sources de contaminations dangereuses » - en clair, des maisons closes. A ce tableau s’ajoutaient les cambriolages et accidents de voitures, qui feraient presque passer Bron pour une saloon du Far West ! Lasse de cette situation, la municipalité en vint donc en mai 1938, à réclamer à cor et à cris la création d’une nouvelle brigade de gendarmerie. Bien évidemment, la commune prendrait à sa charge la construction de l’immeuble destiné à abriter les pandores.
Une gendarmerie « hors sol »
La tactique paya, puisque dès août 1938, le ministre de la Guerre accorda une brigade comprenant un gradé et cinq hommes. L’on se mit donc en chasse d’un terrain pour accueillir cette brigade, et le choix se porta sur une parcelle située 212 route nationale, soit sur l’actuelle avenue Franklin-Roosevelt, à deux pas du cinéma les Alizés et tout près du commissariat de police d’aujourd’hui. Resta à construire le bâtiment. Après les 50.000 francs d’achat du terrain, son coût était estimé à 600.000 francs, toujours à la charge de la commune. L’on dût emprunter, le temps passa, et la Seconde Guerre mondiale éclata. De quoi décourager le projet ? Pas du tout. Malgré le conflit, le chantier fut entamé au printemps 1940, par des artisans lyonnais et brondillants. Le bâtiment touchait presque à sa fin, quand un détail vint tout arrêter. En ces périodes de privations, impossible de trouver un beau parquet de chêne ! Ce n’est qu’en avril 1942 que le problème fut résolu, et en juillet que la brigade fut terminée et accueillit ses premiers gendarmes. Quatre mois plus tard, l’armée allemande occupait Bron.
Aline Vallais
Sources : Archives municipales de Bron, registres des délibérations, 1878-1942.