
Son passage fut bref : six ans à peine. Mais presque un siècle plus tard, les réalisations de cet homme marquent toujours fortement notre ville.
Poursuivez l'Histoire : Retrouvez ici le texte complet de l'article "Histoire et Patrimoine" dont un extrait est présenté dans le magazine municipal B[r]ONjour n°48 de juin 2025.
Le monument est relativement peu connu des Brondillants. Il se dresse au sein du parc de Parilly, dans le jardin alpestre enserré entre les bras du
périphérique. Là, presque au point culminant de Bron, apparaît une stèle de pierres blondes. Elle porte le portrait, réalisé par le sculpteur Raymond Corbin, d’Émile Bollaert, « préfet du Rhône, délégué général du comité français de la Libération ». Le personnage au centre d’un tel honneur est d’origine flamande. Il est né à Dunkerque le 13 novembre 1890, d’un père professeur de musique et d’une mère au foyer. Devenu adulte, Émile Bollaert part faire ses études à Paris, partageant son temps entre le Conservatoire de musique et une licence de Droit. Mais, entre l’univers familial et une carrière de juriste, c’est cette dernière option qu’il choisit. Puis arrive la Première Guerre mondiale, qui le mobilise sur les champs de bataille et lui vaut la Légion d’Honneur. Démobilisé en 1919, il épouse à Roubaix la jeune Flora Willem, issue d’une famille de tisseurs. Cinq ans plus tard, en 1924, sa carrière s’accélère subitement : il devient chef-adjoint du cabinet d’Édouard Herriot, alors maire de Lyon et président du Conseil, soit le plus important personnage de notre pays.
Le boulevard de « ceinture » et un grand parc
Dès lors, commence une très longue complicité entre les deux hommes, qui favorise l’ascension d’Émile Bollaert : il est nommé en 1929 préfet de la Haute-Marne, puis des Vosges et, enfin, préfet du Rhône, en 1934. Sitôt arrivé chez nous, Bollaert se dévoue sans compter pour la région lyonnaise. C’est ainsi qu’il participe, aux côtés de Laurent Bonnevay, président du Conseil général, à la réalisation du « boulevard de ceinture », notre actuel périphérique. Mais on lui doit aussi et surtout la création du Parc de Parilly, dans un quartier qu’il connaît bien puisque depuis 1936, Émile Bollaert habite la villa Rhodania, implantée sur les hauteurs de Bron. Ce parc, monsieur le préfet souhaite qu’il soit traité « dans l’esprit
des parcs naturels, où la main de l’homme devra autant que possible, passer inaperçue. L’ensemble du parc prendra ainsi plutôt le caractère d’un grand bois planté d’essences forestières ». Ainsi fut fait, à partir de 1937 et sur près de 210 hectares. Vous comprenez maintenant pourquoi le
boulevard desservant le sommet du parc, porte le nom d’Émile Bollaert. Même si le grand lac et le zoo prévus dans ses plans initiaux ne furent jamais réalisés, Parilly demeura son oeuvre maîtresse.
Compagnon de la Libération
Arrive juin 1940 et la défaite des troupes françaises face à l’armée allemande. Opposé au maréchal Pétain, Bollaert est destitué de sa charge de préfet et forcé de quitter Lyon pour Paris. Il n’entre pas moins dans la Résistance, où il gagne la confiance du général de Gaulle, qui en fait le successeur de Jean Moulin. Mais en février 1944, Émile Bollaert est arrêté, puis déporté en Allemagne. Il passe par les camps de Buchenwald,
Dora, puis Bergen-Belsen, d’où il revient vivant, par miracle. Fait Compagnon de la Libération, il est nommé en 1947 haut-commissaire en Indochine, puis il retourne en France pour présider, de 1949 à 1960, la Compagnie Nationale du Rhône (CNR), chargée de l’aménagement des grands barrages sur le fleuve roi. Émile Bollaert s’éteignit à Paris, en 1978.
Aline Vallais
Sources : Archives départementales du Nord, 1 Mi 404-R005, et 3 E 15974. www.ordredelaliberation.fr ; www.emile-bollaert.fr