
Il est aujourd’hui l’un des principaux quartiers de notre ville et sortit de terre à une vitesse éclair, au point de surprendre voire d’inquiéter certains Brondillants.
Poursuivez l'Histoire : Retrouvez ici le texte complet de l'article "Histoire et Patrimoine" dont un extrait est présenté dans le magazine municipal B[r]ONjour n°41 de novembre 2024.
1962. Une rumeur court à travers Bron. Elle concerne Terraillon. Sa centaine d’hectares agricoles, semée de-ci de-là d’une poignée de maisons et quelques ateliers, serait livrée aux promoteurs immobiliers. Dans les villas du quartier, dans ses petites entreprises aussi, l’on s’inquiète. Ainsi monsieur Wessier, propriétaire d’une fabrique de vernis, écrit au maire : « Les rumeurs les plus alarmantes et fantaisistes circulent à propos d’une vaste opération d’expropriation en vue d’implanter de nombreux groupes d’immeubles. De telles rumeurs me laissent dans une inquiétude profonde. Je vous demande donc, Monsieur le Maire, de me fournir toutes les précisions sur ces projets ». Il n’a pas tort. Depuis un an au moins les architectes s’affairent. Ils dressent les plans de centaines de logements, pouvant accueillir moult familles et leurs enfants issus du baby-boom, qui réclament un toit à cor et à cri.
Les promoteurs affluent dans la ville
Ainsi, en 1961 un architecte caluirard dessine un groupe d’immeubles chemin du Terraillon pourvu de 160 logements et de 640 pièces. Il n’est pas le seul. Entre 1961 et 1968 les promoteurs affluent de tous côtés, comme la SOLIM, comme la société Bellevue, ou encore la Société Anonyme de Réalisation de Logements (la SAREAL, encore appelée SAIC), dont le siège est implanté en banlieue parisienne et qui projette en 1966 de construire une troisième tranche d’immeubles, forte de 455 logements. Là, dans les blés, c’est une vraie ville qui sort de terre en peu d’années. Une ville avec ses magasins : on prévoit la construction d’un centre commercial « qui comportera 23 logements et 8569 m2 de locaux commerciaux », finalement ramenés en 1966 à 1583 m2. Une ville avec son centre social. Une ville avec ses écoles : trois sont projetées, dont le groupe scolaire « Terraillon-Guillermin » (Pierre-Cot), comprenant 16 classes primaires et 5 classes maternelles, que l’on bâtit aussi vite que possible à partir de 1964, quitte à loger les élèves dans des classes provisoires en attendant que le chantier soit terminé. Une ville avec ses rues aussi, souvent tracées par les promoteurs eux-mêmes, mais que la municipalité finit par planifier en 1964.
Objectif 70 000 habitants !
Et déjà l’on prévoit que « la cadence de ces constructions, loin de se ralentir, va encore s’accélérer puisque notre propre plan d’urbanisme envisage l’implantation dans notre cité, d’une population de 70.000 habitants ». L’on rêve alors d’un Bron à l’américaine. La preuve avec ce plan de Terraillon dressé en 1968. Il montre une large voie sinuant entre les immeubles et les groupes scolaires, au niveau de l’actuelle avenue François-Mitterrand : il s’agit en fait d’une autoroute reliant Neyron à Feyzin ! Cette A46, comme le plan l’appelle, traverserait toute notre ville, frôlerait l’école Jean-Moulin et la place Curial, puis passerait entre le fort et les Alizés ! Les anciens Brondillants voient rouge, et se dressent contre ces projets. Deux mondes s’opposent alors. Les partisans d’un Bron traditionnel, fait de maisons individuelles à perte de vue, que défendent certains élus du Conseil municipal. Et les partisans de la modernité des Trente Glorieuses. Qui finissent par l’emporter. Sauf sur l’autoroute - et personne ne s’en plaindra.
Aline Vallais
Sources : registres des délibérations municipales, 1959-1968 ; cartons 1.811.111/37 et 61.