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L'aéroport : clap de fin ?

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L’aérogare de Bron en 1961
© DR

Fierté de notre ville aujourd’hui, l’aéroport faillit disparaître du paysage brondillant. C’était dans les années 1970. Retour sur cet épisode peu ordinaire.

Poursuivez l'Histoire : Retrouvez ici le texte complet de l'article "Histoire et Patrimoine" dont un extrait est présenté dans le magazine municipal B[r]onjour n°16 de Juin 2022.

Un jour de 1974, vers 22 heures. Dans leur chambre située à proximité des pistes de l’aéroport, Alain et Hervé, âgés de 11 et 15 ans, n’arrivent pas à s’endormir. Ils attendent le décollage du dernier avion de la journée – un Lyon-Paris ? – dont le rugissement des réacteurs empêche tous les jours leur sommeil. Enfin le voici. La nuit va pouvoir commencer. Ils ne sont pas les seuls à se plaindre de l’aéroport.

Vue aérienne en 1968
© DR

Dès 1938, après une série d’accidents mortels, le conseil municipal de Bron s’était dressé contre les dangers du trafic aérien, et aussi contre l’interdiction de bâtir des immeubles aux abords de la piste, alors pourvus d’une “servitude aérienne”. Du coup, tout l’est de la commune était privé d’urbanisation.

Lorsqu’on parla d’un éventuel déménagement (...), les élus brondillants applaudirent des deux mains

Puis, lorsqu’arrivèrent après-guerre les “Trente glorieuses” et leur  prospérité économique, le développement du trafic aérien et l’introduction des premiers avions à réaction ne firent qu’amplifier les problèmes. Aussi, lorsque l’on commença dans la région lyonnaise, à parler d’un éventuel déménagement de l’aéroport pour d’autres communes, à Satolas en l’occurrence, les élus brondillants applaudirent des deux mains : le 21 mars 1969, ils entamèrent leur conseil municipal en réclamant non seulement ce transfert, mais aussi « le départ de toutes les installations existantes » – autrement dit, la suppression pure et simple de l’aéroport.

Vue aérienne de l’aéroport de Bron, en 1970-1975
© DR

L’opposition à l’aéroport prit alors de plus en plus d’importance. Un collectif d’associations monta au créneau et organisa des manifestations publiques, tandis que les élus, maire en tête, multiplièrent les déclarations d’hostilité – comme en juin 1971 au conseil de la Courly (l’ancêtre de la Métropole) ; comme en mai 1972 en conseil municipal, puis à nouveau en avril 1973. Tout un ensemble de griefs alimentèrent le débat. « Les nuisances dues au bruit constituent des atteintes particulièrement préjudiciables à la santé et au repos de l’ensemble de la population, comme au travail scolaire de milliers d’enfants ». On pointa aussi du doigt le « danger permanent représenté par des mouvements journaliers en nombre très important ». Dans une ville manquant cruellement d’espace, on présenta l’avantage qu’offrirait la « possibilité de récupérer les 143 hectares libérés des emprises aéronautiques pour la réalisation d’une zone industrielle “propre” ». Basculer le trafic gros porteurs à Satolas, mais garder à Bron l’aviation d’affaire ? Pour les élus, pas question : ils dénoncèrent le « faible intérêt constitué, en toute objectivité, par les activités de l’aviation d’affaire ou l’aviation privée, par rapport aux dangers encourus ».

L’opposition à l’aéroport brondillant continua ainsi de plus belle, même en mai 1975, alors que Satolas était déjà en service. Puis les choses se calmèrent.

Après le départ des gros porteurs, la ville put enfin aménager une zone industrielle sur les anciens secteurs de servitude aérienne – le parc du Chêne, en 1990 –, tandis que l’aéroport d’affaires était désormais perçu comme un atout de son dynamisme.

Quant à Alain et Hervé, le soir du 20 avril 1975, lorsque le trafic aérien fut basculé de Bron à « Saint-Ex », ils attendirent le décollage du dernier avion. Mais rien ne vint. La nuit était désormais peuplée de silence.

Aline Vallais
Sources : Archives de Bron, registres des délibérations municipales, 1935-1975.

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