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Les maîtres du pain

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Le pain fait partie de notre patrimoine culinaire et culturel, au point que l’on imaginerait mal notre ville sans ses artisans boulangers. Mais en était-il de même autrefois ?

Poursuivez l'Histoire : Retrouvez ici le texte complet de l'article "Histoire et Patrimoine" dont un extrait est présenté dans le magazine municipal B[r]ONjour n°44 de février 2025.

« Long comme un jour sans pain ». « Manger son pain blanc ». « Avoir du pain sur la planche ». « Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour ». Ces expressions de notre langue traduisent on ne peut mieux la place qu’occupait le pain auprès des Français des siècles passés. Et de fait, il était, et de très loin, leur aliment principal, puisque nos prédécesseurs des 17e et 18e siècles en consommaient un kilo à un kilo et demi par jour et par personne ! Bien plus donc, que les 100 grammes quotidiens dont nous nous délectons au 21e siècle. Aussi, il y a belle lurette que les Brondillants disposent de boulangers dans leurs quartiers. C’était déjà le cas il y a cent ans, car le recensement de 1921 en cite quatre, alors que notre commune était peuplée par 6397 habitants. L’un tenait boutique boulevard Philippe-Pinel, à deux pas du Vinatier ; deux autres « Route nationale », soit sur l’actuelle avenue Franklin-Roosevelt ; et un dernier sur la place Baptiste-Curial : il s’appelait Léon Casari, et était né en 1888 à Bergame, au pied des Alpes italiennes.

Un commerce déjà prégnant

Remontons encore plus haut dans le temps, jusqu’en 1866, date du plus ancien recensement conservé pour notre ville. Ou plutôt, pour notre village, puisque le Bron de l’époque ne comptait que 1041 habitants. Or, les boulangers sont déjà là ! Et ils sont nombreux, pas moins de trois : Claude Royet, dont la femme Anne Jacquemin est aussi épicière ; Claude Durand, à peine âgé de 26 ans ; et enfin Jean Payet, 54 ans, qui officie avec son épouse Benoite Suzet, qualifiée de boulangère par l’agent recenseur. Encore un saut en arrière ? Plongeons à présent dans le 18e siècle. Le seul boulanger que nous ayons retrouvé dans les archives brondillantes de ce temps précédant la Révolution, se nommait Antoine Fantogé, et travaillait en février 1789 en compagnie d’un mitron, Pierre Barge, originaire de Saint-Georges-d’Espéranche, en nord-Isère. Hélas, la description de sa boulangerie ne nous est pas parvenue. En revanche, celle de son confère Henri Mas, « maistre bollengier » de Saint-Priest, permet d’en avoir une idée. En 1682, ce maître du pain tient boutique… dans sa chambre ! C’est là que se trouvent le grand coffre d’osier contenant les pains destinés à ses clients, et une balance pour les peser. Tout à côté, adossé à la cuisine, trône un appentis, la « gloriette », où Henri Mas prépare sa production.

Une boulangerie-poulailler...

Cette pièce abrite un long pétrin pour fabriquer la pâte, et surtout un four monumental, prêt à cuire sa fournée à 250-300°. Ce monstre engloutit des montagnes de bois, au point qu’Henri Mas en possède deux charretées dans sa cour. Sa boulangerie du temps de Louis XIV reste cependant bien éloignée des critères sanitaires qui s’imposent aujourd’hui. La preuve ? Au-dessus du four, et donc à portée immédiate des miches et de la pâte, « sont quelques branches de bois servant de gelinier [de poulailler] sur lesquelles s’est trouvé 15 poules et un coq »… Par chance, le notaire à l’origine de cette description a aussi mentionné les pains alors produits par nos boulangers de l’Est Lyonnais. Ils étaient de seigle ou de froment, et seulement de trois sortes : des gros pains longs pesant jusqu’à six kilos, des pains de taille moyenne, et des « petits pains d’un sol », tenant dans le creux de la main.

Aline Vallais

Sources : Archives du Rhône, 3 E 171, Edépôt 29/2, 6 M 231 et 595.

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