Sous l'Ancien Régime, Bron n'était pas un village bien riche. Sa terre aux sols légers, caillouteux, qu'aucun cours d'eau ne venait arroser lors des sécheresses d'été, ne portait jamais de belles récoltes ; les "brosses", les mauvaises herbes et les buissons, l'emportaient souvent sur les champs de blé. Les moutons, eux, trouvaient là leur pitance. Chaque année, la moitié des champs cultivés de la commune, soit environ 300 hectares, étaient laissés en jachère (en repos) et devenaient un paradis pour brebis. Certains paysans avaient bien tenté d'élever des boeufs et des vaches, mais comme en été l'herbe devenait trop rare pour les nourrir, ils étaient vite revenus aux bêtes à laine.
Ces moutons étaient très nombreux. Un texte conservé aux Archives du Rhône et daté de 1739, en recense plus de 1500, rien que dans les six plus grosses fermes du village. Le fermier du domaine de Rebufer en possède 200, le seigneur de Bron 300. Pierre Callemard et Jean Chausson, eux, en engraissent chacun 400, sur des parcelles appartenant à un certain Monsieur de Monquin. A ces 1500 bêtes, il faut encore ajouter celles détenues par les petits paysans : Antoine Fouilloud par exemple, en élève 50 alors qu'il n'a qu'un petit domaine de 1,5 hectare. Au total, il y avait peut-être 2000 ou 2500 têtes à Bron. On imagine sans peine le premier bruit que les voyageurs de la grande route d'Italie devaient entendre en arrivant à Bron : Bêêêêêê !
Toutes ces brebis n'étaient évidemment pas destinées à la consommation des Brondillants. Elles partaient à Lyon, où sous les couteaux des bouchers elles devenaient côtelettes ou gigots, et terminaient leur existence dans l'estomac d'un canut de Saint-Jean ou d'une bonne-soeur de la place des Terreaux. Cet élevage périclita peu à peu au cours du 19e siècle et au début du 20e, lorsque les champs reculèrent devant les maisons et les pavillons. L'agneau de Bron dut alors céder sa place à son cousin de Sisteron sur les tables de la capitale mondiale de la gastronomie.
Pour aller à l'étape suivante :
- Continuer à marcher le long de l'avenue Ferdinand-Buisson.
- S’arrêter devant la porte de l'église saint Denis, qui marquait sous l'Ancien Régime le cœur de l'ancien village de Bron.